29 avril 2020
Face à la réserve naturelle « Los Puertos de Beceite », à la frontière entre la Catalogne et la province d’Aragon, les SOLO Houses font corps avec le paysage © SOLO Houses
Dans le texte intitulé « Stratégies architecturales & mondialisation », publié en 2009, mais écrit juste avant les crises bancaire et financière de 2008, dans le numéro 1 de la revue Stream (1), la question portait sur les moyens de création dont disposent encore les architectes dans une civilisation contemporaine entrée dans une phase d’hyper complexité. Vingt ans après la chute du mur de Berlin et la prise de conscience de la fin du monde bi-polaire (Ouest/Est), l’augmentation exponentielle des normes en tout genre et la validation d’une « société-monde » (2) régie par un ensemble de systèmes « hors-sol », plusieurs hypothèses se posaient comme lignes de fuite. L’attitude comme forme (3) d’action sur le discours et la forme du projet, et la stratégie de l’Alien - comment utiliser un corps étranger pour en ressortir plus fort - étaient convoquées pour contrecarrer les attaques continuelles contre l’architecture par toutes celles et ceux qui ont oublié le mot « art » dans la définition de l’art de bâtir des édifices. Un autre aspect fondamental y était abordé, celui de la commande. Le statut de producteur-auteur propre à l’industrie cinématographique est sollicité comme modèle à adopter pour la création du producteur-auteur d’architecture.
Dix ans plus tard où en sommes-nous ?
Rivière dans la réserve naturelle « Los Puertos de Beceite », à quelques pas des terres constructibles des SOLO Houses © SOLO Houses
Le producteur.e-auteur.e d’architecture
Au niveau mondial l’architecture glisse progressivement vers une simple activité de coordination des travaux, exit la dimension artistique de cette discipline « mère des arts » ! Heureusement certains maîtres d’ouvrage prennent les habits du producteur-auteur. Parmi eux se trouve un couple dans la vie et professionnellement. Une femme - Eva Albarran - dans le monde de l’art depuis plus de 15 ans, à la tête de Eva Albarran & Co, une agence de production et d’accompagnement de projets d’art contemporain (Nuit Blanche, Pavillon français à la Biennale de Venise, etc). Un homme - Christian Bourdais - promoteur entrepreneur immobilier. Ensemble ils lancent SOLO Galerie/Paris et SOLO Galeria/Madrid. La parisienne montre le travail de recherche « plastique » d’une agence d’architecture. Depuis son ouverture, en 2014, Bijoy Jain du Studio Mumbai, Smiljan Radic, Anne Holtrop, Muller Van Severen, Bas Princen, Pezo Von Elrichshausen et Hélène Binet, ont présenté leurs travaux rue des Arquebusiers dans le Marais, Paris 3e. La Madrilène expose la fine fleur de l’art contemporain international. Parmi les artistes de la galerie, Dominique Gonzales Foerster, Angelika Markul, Morganne Tschiember, Christian Boltanski, Olivier Mosset, Felice Varini, etc ont montré leurs œuvres depuis février 2017. Art et architecture sont au cœur de des préoccupations émotionnelles, conceptuelles et commerciales de BourdaisAlbarran. Férus d’art contemporain et sensibles à l’architecture expérimentale (construite ou pas), ils décident, en 2010, d’acquérir à deux heures de l’aéroport de Barcelone, un terrain de cent hectares en pleine campagne pour l’offrir comme terrain de jeu aux architectes les plus expérimentaux. Pourquoi se lancent-ils dans cette folle entreprise ? Depuis dix ans, ils constatent que l’architecture a perdu la main quant à sa faculté de produire des chefs-d’œuvre. Il faut offrir à cette discipline les moyens d’être à nouveau le fer de lance de l’avant-garde de son temps. Ce sera un projet de résidences secondaires appelé SOLO Houses.
Un paysage grandiose pour des villas à la hauteur du contexte © SOLO Houses
SOLO Houses : Une nature abondante aux reliefs accidentés
Dans le pays Matarraña, dans la région de l’Aragon, aux alentours de Tortosa et face au parc « naturel » Los Puertos de Beceite, se trouve une cosmogonie dédiée à l’avant-garde architecturale habitée. Christian Bourdais et Eva Albarran ont donc décidé d’y installer quinze villas contemporaines, le tout paysagé par l’architecte Bas Smets. Dans un deuxième temps, le célèbre commissaire d’exposition d’art contemporain Hans-Ulrich Obrist (co-directeur de la Serpentine Gallery à Londres) viendra ponctuer les sentiers du site d’œuvres spécialement conçues pour ce cadre idyllique où les oliviers côtoient les amandiers, les vignes ; où les collines et les moyennes montagnes offrent des perspectives multiples et magnifiques. Conscients de posséder un environnement propice à la contemplation et au repli vis-à-vis de l’agitation urbaine des grandes agglomérations européennes, les deux collectionneurs d’architecture décident d’implanter au compte-goutte les demeures et selon la géographie physique du lieu. Après avoir arpenté le territoire à multiples reprises, ils repèrent les nombreux points de vue offerts par les mouvements de terrain naturels. Ces derniers servent d’implantation pour chaque architecte invité.e à dessiner un espace d’habitation. Outre la topographie et la richesse du végétal en présence dans cet environnement, l’autre élément à prendre en compte par les architectes tient dans l’obligation d’être en autonomie énergétique. Le cadre facilite la réflexion sur les relations entre « nature » et « architecture ». Depuis le premier abri, cette réflexion poursuit les humains, raison de plus pour en faire un sujet d’avant-garde. Revenue de la modernité et de la post-modernité, l’avant-garde architecturale du XXIe semble avoir digéré les deux paradigmes du siècle dernier et cherche à renouveler formellement l’antienne figure de l’abri face aux éléments - la maison - tout en s’appuyant sur de nouveaux discours dans lesquels l’histoire, la radicalité, le langage, les conditions de production, de consommation et d’image de marque sont pris en compte.
Fort de ce constat, le couple producteur-auteur se documente, regarde, visite et choisit leurs futures équipes.
Le casting des architectes est à la hauteur du site. Internationales, les scènes architecturales asiatiques (Mumbai, Tôkyô), européennes (Barcelone, Paris, Bruxelles, Berlin, Oslo) et américaines (Conception, Mexico City, Los Angeles, New York) dessinent ici les contours d’un nouveau spectre de l’avant-garde architecturale en ce début de XXIe siècle. Par ordre continental et de villes citées, la liste des agences sélectionnées est la suivante : Bijoy Jain (Mumbai Studio), Go Hasegawa, Sou Fujimoto, Makoto Takei & Chie Nabeshima (TNA), Barozzi Veiga, Didier Faustino, Kersten Geers & David Van Severen (Office KGDVS), Jean-Pascal Flavien, Kuehn Malvezzi, Rintala Eggertsson, Pezo Von Ellrichshausen, Tatiana Bilbao, Johnston Marklee, Hilary Sample & Michael Meredith (MOS) et Jing Liu & Florien Idenburg (SO-IL). Constitué pour l’occasion, ce groupe ne forme aucunement un mouvement mais l’addition de chaque démarche permet de cerner les contours conceptuels et plastiques de cette nouvelle avant-garde architecturale.
Avant de rentrer dans le détail des deux projets construits à ce jour, ce programme de villas individuelles s’inscrit d’ores et déjà dans une histoire marquée par quelques tentatives incontournables.
Le lotissement Weissenhof / Stuttgart (1927) si célèbre de la modernité architecturale.
SOLO Houses : si proche et si loin de la cité de Weissenhof et des villas Baba
Si l’avant-garde architecturale du début du XXe siècle se cristallisa dans l’exécution systématique des cinq points fondamentaux de l’architecture moderne du Corbu (Pilotis - Façade libre - Fenêtre en bandeau - Toit-Terrasse - Plan libre) pour tout type de programme, le groupement de maisons individuelles reste la grande figure de la modernité. A l’initiative du Deutscher Werkbund (1898-1927), le lotissement deviendra le terrain d’expérimentation de toutes les théories du mouvement moderne. N’oublions pas que le Werkbund fut créé par un architecte - Hermann Muthesius -, un homme politique - Friedrich Naumann - et un artisan entrepreneur - Karl Schmidt-Hellerau. L’architecte réforma l’enseignement des arts décoratifs après son retour d’Angleterre (1904) et sa découverte du mouvement Arts & Crafts. Le politique rédigea en 1908 un ouvrage clé Die Kunst im Zeitalter der Machine (« L’art à l’époque de la machine »). L’artisan fonda les ateliers des arts appliqués de Dresde, après avoir initié la cité-jardin Hellerau (1909) dans la banlieue nord de la capitale de la Saxe. L’histoire retiendra l’architecte allemand Peter Behrens comme figure tutélaire de ce mouvement qui aura vu naître le design industriel d’entreprise. Pourquoi lui ? Tout simplement parce que Walter Gropius, un certain Mies et même Le Corbu passèrent dans son agence au début du XXe siècle. Sa direction artistique pour la firme AEG (Allgemeine Elektricitäts Gesellschaft « Compagnie d’Electricité Générale ») eut pour objectif d’inonder le marché allemand d’objets manufacturés « design » afin d’émanciper les masses par le mariage de l’art, de l’artisanat et de l’industrie. Mais l’échelle des objets du quotidien ne suffit pas, il fallut s’attaquer à celle de l’architecture domestique : la maison individuelle. Dans les années 1920, fleurirent plusieurs lotissements à l’initiative du Werkbund.
Deux d’entre eux - le Weissenhofsiedlung et Osada Baba - retiendront notre attention dans le cadre de notre étude sur le domaine des SOLO Houses espagnoles.
Le lotissement Osasa Baba / Prague (1928-34), moins connu mais néanmoins aussi radical pour lʼépoque que celui de Weissenhof / Stuttgart.
La première raison de ce choix se retrouve dans les deux opérations immobilières citées, dans la volonté du Werkbund d’exposer, sur un terrain vierge de toute construction, à l’échelle 1, un ensemble expérimental de logements (individuels, individuels groupés ou collectifs) afin de servir de modèle à la construction moderne en série et à sa propagation nationale et internationale. En 1927, le Werkbund allemand décida d’implanter vingt-et-un immeubles d’habitation sur le terrain Weissenhof, au nord de Stuttgart. Ludwig Mies van der Rohe en dessina le plan d’ensemble et sur les hauteurs du site, un immeuble collectif dédié aux travailleuses et ouvriers. Parmi les architectes ayant participé à l’aventure, nous retrouvons Peter Behrens, Le Corbusier, Walter Gropius, Hans Scharoun, Bruno Taut, Hans Poelzig, Ludwig Hilberseimer, Mart Stam. Ce show room praticable entérina la domination de la maison cubique blanche aux yeux du monde progressiste. Hélas, seule l’élite culturelle, encore exclusivement bourgeoise à l’époque, profita de ce nouveau confort aux formes épurées. Est-ce vraiment une surprise ? Comme l’avait si bien démontré l’historien critique de l’architecture Manfredo Tafuri (4), il est impossible de repenser le projet dans sa globalité, si les dimensions politiques, sociétales et l’éducation à l’architecture ne sont pas posées en préambule. Qu’à cela ne tienne ! Cette collection de maison moderne à ciel ouvert, praticable, et même habitable, donna des idées à la branche tchèque du Werkbund. Dans le cadre de la première République tchécoslovaque (1918-38), un vent d’espoir dans le progrès permit à l’avant-garde architecturale fonctionnaliste et plastique de projeter une cité expérimentale sur les coteaux Dejvice, au nord de Prague. Avec l’aide de la Svaz ceskoslovenského dila (« Fédération Tchécoslovaque des Arts Décoratifs »), et à la suite de l’importante exposition permanente de Brno de 1928, dédiée à l’architecture « abstraite », un groupement d’architectes et de client.e.s issu.e.s de la Svaz décida d’élever tout un quartier de maisons unifamiliales : Osada Baba, littéralement le lotissement Baba. Baba est le nom d’une tour en ruine, seule présence construire à l’extrême Est de la parcelle. Sous le plan régulateur (1928-34) de l’architecte tchèque très en vue à l’époque - Pavel Janak - trente-trois villas furent édifiées avec un souci d’équilibre entre les masses construites et les jardins. Ces derniers devaient servir de tampon et de poumon entre chaque entité. Aujourd’hui les arbres ont poussé, les jardins sont fleurissants, ils donnent au quartier des Villas Baba une ambiance dès plus agréable à l’œil. Les formes cubiques blanches ou grises habitées, entourées de cette végétation luxuriante, valident totalement les intentions de ce projet. La symbiose entre le bâti et la nature « naturée » permet l’épanouissement des habitant.e.s. Le seul bémol, récurrent à cette période magique de l’avant-garde cubique, reste le statut social des maîtres d’ouvrage. Annoncé comme un programme a destination des masses, les différent.e.s occupant.e.s des lieux, en 1934, et plus que jamais aujourd’hui, sont des personnalités issues de la vie culturelle ou du pouvoir éduqué et sensible à l’avant-garde, donc à l’architecture la plus éloignée de la tradition. Si le détour par deux moments de l’architecture moderne montre à quel point l’architecture d’avant-garde reste à la portée d’une minorité, nous ne pouvons que le déplorer mais cela ne doit en aucun cas empêcher les initiatives des trop rares producteurs-auteurs de s’engager dans un travail de « veilleurs de l’avant » (5). La baisse de régime des pouvoirs publics en matière de commandes a déjà été abordée. Des quantités de signes pourraient être écrits sur l’inexistence notoire de sensibilisation à l’architecture d’avant-garde dans la majorité des établissements non spécialisés et à caractère pédagogique dans le monde. Si seulement l’architecture moderne y était abordée ! Seules les vieilleries militaires et religieuses ont la côte. Tout est dit. Et il serait inconvenant d’en vouloir aux enseignant.e.s, la responsabilité tient davantage au manque d’intérêt en la matière des élu.e.s de tout bord, ou de l’incompétence notoire de ces dernier.e.s, voir du rejet pur et simple vis-à-vis de l’architecture non-traditionnelle.
Visiblement l’architecture domestique et l’avant-garde doivent rester l’apanage des amateurs. Soit !
Voyons à travers la description des deux premières SOLO Houses construites comment cette avant-garde s’incarne dans un lieu dédié à l’essence même de l’architecture : habiter !
Faustino house @ SOLO Houses
Architecture, art, paysage : plus que jamais dʼavant-garde
La SOLO Pezo dans son environnement, entre présence et absence @ SOLO Houses
La SOLO Pezo du duo chilien Pezo Von Ellrichshausen a été Inaugurée en 2014. Le langage architectural utilisé est d’une facture brutaliste en béton brut de décoffrage. D’un plan carré, décliné de manière homothétique en façade, en coupe et en plan, le sol glisse sous la maison et lui donne un aspect aérien. Tel l’arbre flirtant avec la façade côté sommet de la colline, la demeure, vue de la vallée, ressemble à ce chêne. Découpée en trois parties, un escalier extérieur permet de grimper de la vallée à la maison et joue le rôle de racines, une cage d’escalier tout en béton évoque le tronc d’arbre, et les différentes pièces de l’unique niveau habité, tout en plein et vide, renvoie au feuillage des caducs. Un patio cache une piscine tel un nid venu se lover dans les entrailles du feuillu. La métaphore est aisée mais efficace. L’art ici réside dans cette faculté de transformer le béton brut en écorce et rameau dès plus organiques. Les différents intérieurs de la SOLO Pezo offrent un luxe de lumière et des points de vue époustouflants sur la réserve naturelle.
Avant de traduire leurs recherches de formes architecturées et en parallèle de toute application dans l’acte de bâtir, les architectes peignent de grands formats avec des motifs abstraits ou figuratifs qui mettent en scène leurs rêves architecturaux, ou simplement un concept, une idée d’architecture.
La deuxième villa date de 2017, Office KGDVS l’a imaginée. Les deux architectes Kersten Geers & David Van Severen imaginent souvent leurs projets à partir d’une photographie du plasticien Bas Princen (photographe d’architecture par ailleurs). Ils traduisent la commande dans une représentation-concept sous forme de collages. Ensuite, ils convoquent matériaux et techniques de construction en adéquation avec la représentation-concept. Pour la SOLO Office, ils ont décidé d’annuler purement et simplement le cliché de la maison avec son toit à deux pentes, ses quatre murs, sa porte d’entrée et ses deux fenêtres en façade sur rue. Un plan circulaire composé d’une dalle béton sert de plancher bas et un autre de plancher haut. Entre les deux : rien ! Juste une série de meubles faisant office de mini balises pour la circulation des lieux. Tout le mobilier de la villa permet de vivre dans cette non-maison. Les murs, eux, se résument à une cloison mobile montée sur rails, histoire de fermer une partie de l’immense zone habitable, en cas d’intempérie. Le soleil brille souvent dans la région donc la fermeture reste du domaine de l’exceptionnel. Plusieurs points de vue sur la végétation abondante s’offrent aux habitant.e.s grâce à l’implantation judicieuse de la résidence. Quelques volumes platoniciens de couleurs différentes sont placés sur le toit-terrasse. Ils ont pour vocation d’assurer les besoins techniques de l’habitation. Cet ensemble très vide, contrarié par des volumes sculpturaux massifs et baroques, indique la volonté conceptuelle chez les architectes belges de tenter la synthèse entre langage moderne et écriture post-moderne afin de les dépasser pour mieux inventer un nouveau vocabulaire. Ce dernier aurait pour vertu d’incarner l’avant-garde du début du XXIe siècle.
La traduction de la réflexion conceptuelle de tout projet par une pratique plastique assimilée aux arts visuels (peinture, gravure, dessin, collage, etc) est une des caractéristiques récurrentes dans le choix des architectes par le couple producteur-auteur. Christian Bourdais dit clairement que la rencontre du monde de l’architecture s’est faite par celui de l’art.
Pratiquement toutes les agences sélectionnées pour SOLO ont réalisé un musée, un centre d’art, une galerie, exposé chez SOLO galerie. Les architectes SOLO sont des artistes qui font de l’architecture, ou inversement. La dimension artistique de l’architecture est à l’œuvre à bien des égards. L’hypothèse de définir la nouvelle avant-garde architecturale du XXIe siècle tiendrait donc dans la capacité des maîtres d’œuvre à faire de l’art avec les moyens de l’architecte, non seulement dans l’idée d’une partition - c’est-à-dire toutes les esquisses et plans avant construction, comme une partition musicale se crée avant d’être jouée - mais aussi dans la capacité à vivre dedans, dans sa dimension construite, en d’autres termes une avant-garde habitable.

Avec ce parc de maisons à géométrie variable, Christian Bourdais et Eva Albarran souhaitent développer l’aspect hôtelier du site. Au quinze villas projetées, un hôtel de quinze chambres viendra compléter la gamme des locations. Le Chilien Smiljan Radic en a dessiné les plans. Les propriétaires, l’un comme l’autre, passionnés par l’architecture et l’art, ont mis en place un Summer Art Group Show. La première édition a été lancée fin mai 2019. Différentes œuvres balisent un parcours piétonnier tracé au travers les cultures et les vignobles. A terme, chaque œuvre d’art serait vue d’une des maisons. Un jeu de regards entre sculptures et œuvres architecturales s’installera, l’ensemble dans un cadre végétal aux variations saisonnières. Ce mariage entre architecture, art et paysage devient la marque de fabrique du projet SOLO Houses. Cette manière d’organiser la gestion des corps, des regards, de la notion de confort et de la vie quotidienne des résident.e.s transfigure le réel en fiction contemplative d’une triple nature - végétale, minérale et animale. Un moyen d’être dans et hors du monde dans un même mouvement.
« N’importe où hors du monde » comme disait un certain Baudelaire. Quel bonheur !

Christophe Le Gac
Le SOLO Hotel par Smiljan radic, entre présence et absence
(2) Marie-France Durand, Jacques Lévy, Denis Retaillé, Le monde : espaces et systèmes, coll. « Amphithéâtre », presses de la Fondation nationale des sciences politiques & Dalloz, Paris, 1992
(3) Clin d’œil à l’exposition « Quand les attitudes deviennent formes », (When attitudes become form : live in your head, 1969), sous la houlette du commissaire d’exposition d’art contemporain Harald Szeemann. Dans la Kunsthalle de Bern, en Suisse, tous les artistes des mouvements Land Art, Minimal Art et Conceptual Art y ont installé leurs œuvres autant que leurs manières d’être face au monde. L’idée et le discours prenaient autant de place que les formes plastiques qui en découlaient.
(4) A noter l’excellent ouvrage sur la pensée de Tafuri : Marco Assennato, La muse inquiétante - Architecture & société chez Manfredo Tafuri, éditions MIX, Paris, 2019.
(5) Terme emprunté au spécialiste de l’intelligence économique Rémy Pautrat, ancien président de l’Institut d’Etudes et de Recherche pour la Sécurité des Entreprises (IERSE), aujourd’hui intégré dans l’INHESJ (Institut des Hautes Etudes de la Sécurité et de la Justice).
Back to Top